UKRAINE. Si les mineurs se réveillent…
50.000 Ukrainiens travaillent, directement ou pas, dans les mines. S’ils se soulèvent, la situation, déjà totalement chaotique, sera incontrôlable.
On les repère facilement à cette ligne de khôl indélébile
qui borde leurs yeux, cette poussière de houille dont aucun lavage ne
peut venir à bout. Jeudi, ils étaient nombreux, au milieu des manifestants pro-russes qui ont violemment attaqué à coup de matraques et de barres de fer,
le bâtiment où est hébergé le parquet de Donetsk. On les voit aussi sur
les check-point au milieu des miliciens cagoulés qui contrôlent les
véhicules entre Donetsk et Lugansk. Mais ils ne forment pas, pour
l’instant, le gros des bataillons. Pas question de quitter la mine, une
situation privilégiée dans cette région littéralement minée par le
chômage… "Le patron nous a clairement dit qu’on serait viré après une
seule journée d’absence", regrette Vadim, 24 ans, qui rêverait d’en
découdre lui aussi avec "les fascistes de Kiev" comme on les appelle
ici.
Les puits de Shakhtar dont il dépend est comme 80% des mines du Donbass, sous perfusion des subventions publiques. "On vend le charbon moins cher qu’il ne coûte à produire", explique cet ouvrier de 46 ans. La faute, d’après lui, aux propriétaires des mines, qui, depuis les privatisations, n’ont jamais investi. "Elles auraient fermé depuis longtemps sans aides publiques". "Or, avec la crise, Kiev n’envoie plus rien", croit-il savoir. En même temps, les livraisons à la Russie, qui représentent près de la moitié de la production, ont subi un sérieux coup de frein. La production est en chute libre. Bref, c’est la bérézina. Mais pour l’instant, les mineurs sont plutôt épargnés. Salaires payés en temps et en heure, pas de chômage technique, contrairement à ce qui se passe dans la plupart des autres entreprises…
Pour l’instant, il a été très prudent, se gardant de mettre tous ses œufs dans le même panier. D’un côté, il soutient financièrement le parti des régions, le parti du président déchu Ianoukovitch; mais il a été vu récemment avec le plus célèbre ennemi de Poutine, le milliardaire Michail Khodorovski, en exil depuis sa libération, et reçu l’ancien boxeur Vitaly Klitschko, l’un des chefs de file du mouvement de Maïdan. Pas question de trancher avant de voir où va le vent.
50.000 personnes travaillent, directement ou pas, dans les mines, l’un des plus gros employeur de la région. S’ils se soulèvent, la situation, déjà totalement chaotique, sera incontrôlable. La crise économique est au cœur mouvement séparatiste. Le chômage explose. Et les laissés pour compte forment le gros des troupes. De nombreuses usines ont du se résoudre au chômage technique. Tandis que la monnaie ukrainienne joue au yoyo, les prix de la viande, des denrées alimentaires et de l’essence, ont quasiment doublé en un mois. "Kiev nous a mis dans une impasse", dit Vassili. "Avant de destituer Ianoukovitch, ils n’ont pensé à rien. Ni au prix du gaz, ni au liens économiques entre nos deux pays. Nous, on sait qu’on ne peut pas survivre sans la Russie".
Natacha Tatu, envoyée spéciale du "Nouvel Observateur" en Ukraine
"Une fois lancés, rien ne peut nous arrêter"
Officiellement, les porte-paroles des syndicats de mineurs ont affirmé qu’ils n’étaient pas partie-prenante dans le conflit. Mais personne n’est dupe. La plupart d’entre eux ont le coeur côté Moscou. Un appel à la grève générale lancé au début de la crise pour "une Ukraine Unie", par un syndicat de mineurs Pro Maidan a fait un bide. Pour la plupart des mineurs, il n’y a rien de bon à attendre de Kiev. Venu avec une vingtaine de collègues sur cette place de Donetsk, où se rassemblent chaque jour sympathisants et activistes du mouvement séparatiste pro-russe, Vassili ne cache pas ses convictions : "Notre avenir est indissociable de celui de la Russie".Les puits de Shakhtar dont il dépend est comme 80% des mines du Donbass, sous perfusion des subventions publiques. "On vend le charbon moins cher qu’il ne coûte à produire", explique cet ouvrier de 46 ans. La faute, d’après lui, aux propriétaires des mines, qui, depuis les privatisations, n’ont jamais investi. "Elles auraient fermé depuis longtemps sans aides publiques". "Or, avec la crise, Kiev n’envoie plus rien", croit-il savoir. En même temps, les livraisons à la Russie, qui représentent près de la moitié de la production, ont subi un sérieux coup de frein. La production est en chute libre. Bref, c’est la bérézina. Mais pour l’instant, les mineurs sont plutôt épargnés. Salaires payés en temps et en heure, pas de chômage technique, contrairement à ce qui se passe dans la plupart des autres entreprises…
Les propriétaires ont peur. Car une fois que nous sommes lancés, rien ne peut nous arrêter", constate Vassili.
Personne, ici, n’a oublié les manifestations de la fin des années 80 qui ont fait vaciller la région, participé à l’éclatement de l’URSS et conduit à l’autonomie de l’Ukraine. La roue a tourné. Aujourd'hui, ils sont convaincus que c’est de Moscou que viendra le salut ; En tout cas pas de Kiev. "Ils n’ont pas les moyens de nous maintenir en activité. Ils fermeront toutes les mines", dit Vassili. Il ne rêve pas pour autant de voir le Donbass absorbé comme la Crimée par la Russie : "L’idéal serait qu’on arrive a constituer une région indépendante. On a beaucoup de ressources ici, il suffit de les développer, au lieu de les piller comme ils l’ont fait jusque là."50.000 travailleurs
Le 22 Avril, quand plusieurs milliers d’employés des mines de Krasnodogonougol appartenant à Rinat Ahmetov, le principal oligarque de la région, considéré comme l’homme le plus riche d’Ukraine, se sont mis en grève pour réclamer des augmentations de salaire. Les dirigeants des mines se sont rapidement assis autour de la table, et ils ont lâché du lest. Rinat Akhmetov, qui sait qu’il est aussi, indirectement, l’une des cibles du mouvement qui dénonce les oligarques et le gouvernement local corrompu, sait qu’il joue gros.Pour l’instant, il a été très prudent, se gardant de mettre tous ses œufs dans le même panier. D’un côté, il soutient financièrement le parti des régions, le parti du président déchu Ianoukovitch; mais il a été vu récemment avec le plus célèbre ennemi de Poutine, le milliardaire Michail Khodorovski, en exil depuis sa libération, et reçu l’ancien boxeur Vitaly Klitschko, l’un des chefs de file du mouvement de Maïdan. Pas question de trancher avant de voir où va le vent.
50.000 personnes travaillent, directement ou pas, dans les mines, l’un des plus gros employeur de la région. S’ils se soulèvent, la situation, déjà totalement chaotique, sera incontrôlable. La crise économique est au cœur mouvement séparatiste. Le chômage explose. Et les laissés pour compte forment le gros des troupes. De nombreuses usines ont du se résoudre au chômage technique. Tandis que la monnaie ukrainienne joue au yoyo, les prix de la viande, des denrées alimentaires et de l’essence, ont quasiment doublé en un mois. "Kiev nous a mis dans une impasse", dit Vassili. "Avant de destituer Ianoukovitch, ils n’ont pensé à rien. Ni au prix du gaz, ni au liens économiques entre nos deux pays. Nous, on sait qu’on ne peut pas survivre sans la Russie".
Natacha Tatu, envoyée spéciale du "Nouvel Observateur" en Ukraine
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